FinTech, AssurTech, RegTech : comment ces secteurs révolutionnent le recrutement ?

Une révolution à trois dimensions dans le monde financier

La finance traditionnelle connaît aujourd'hui sa plus grande métamorphose. Trois acteurs majeurs sont au cœur de cette transformation : les FinTech qui révolutionnent les services bancaires et de paiement, les AssurTech qui digitalisent l'assurance de A à Z, et les RegTech qui réinventent la conformité réglementaire grâce aux technologies.

En France, le secteur des FinTech a connu une croissance exceptionnelle avec plus de 750 startups actives en 2024, représentant plus de 25 000 emplois directs selon France FinTech. Ce dynamisme se traduit par des besoins en recrutement inédits, tant en volume qu'en nature.

"Les FinTech, AssurTech et RegTech créent chaque année près de 3 000 nouveaux emplois en France. Des postes qui n'existaient tout simplement pas il y a dix ans." — Observatoire des métiers de la finance, 2024

Ces startups ne se contentent pas de digitaliser l'existant. Elles inventent de nouveaux business models, de nouveaux produits, et par conséquent, de nouveaux métiers. Le tout à une vitesse qui déstabilise les acteurs traditionnels et leurs méthodes de recrutement historiques.

L'émergence de profils hybrides : les nouveaux talents recherchés

Au-delà des compétences techniques pures

La première révolution concerne les profils recherchés. Exit les silos entre expertise métier et technique. Les entreprises innovantes du secteur financier privilégient désormais les candidats multidimensionnels capables de faire le pont entre plusieurs univers :

• Les développeurs full-stack maîtrisant également les enjeux réglementaires (RGPD, DSP2, KYC)
• Les data scientists capables d'interpréter les données financières et d'expliquer leurs algorithmes aux régulateurs
• Les experts conformité et sécurité avec des compétences en automatisation et codage
• Les product managers combinant une expertise financière solide et une maîtrise des méthodes agiles
• Les UX/UI designers spécialisés dans les interfaces financières complexes

Cette hybridation des compétences répond à un besoin concret : développer des produits financiers innovants tout en respectant un cadre réglementaire exigeant et en garantissant une expérience utilisateur fluide.

Les soft skills devenues essentielles

Au-delà du savoir-faire technique, les recruteurs des FinTech, AssurTech et RegTech accordent une importance croissante aux compétences comportementales :

1. L'adaptabilité face à un environnement en constante évolution
2. La curiosité intellectuelle permettant d'anticiper les innovations
3. L'intelligence collaborative essentielle dans des équipes pluridisciplinaires
4. La résilience face aux itérations et pivots stratégiques
5. L'esprit entrepreneurial même en tant que salarié

Dans un secteur où le changement est la seule constante, ces qualités humaines font souvent la différence entre un recrutement réussi et un échec.

La révolution des méthodes de recrutement

Des processus accélérés et repensés

Les startups financières ont compris que la guerre des talents se joue aussi sur le terrain de l'expérience candidat. Elles ont donc massivement simplifié leurs processus de recrutement :

• Réduction du nombre d'entretiens (3 maximum contre 5 à 8 dans les institutions traditionnelles)
• Tests techniques basés sur des cas réels plutôt que des questionnaires théoriques
• Délais de décision raccourcis (souvent moins de deux semaines contre plusieurs mois)
• Implication directe des équipes opérationnelles dans la sélection

Cette agilité permet de capter les meilleurs talents avant qu'ils ne soient séduits par la concurrence, notamment les GAFAM qui recrutent aussi activement des profils similaires.

L'ouverture à des parcours atypiques

Les FinTech, AssurTech et RegTech se distinguent également par leur capacité à valoriser des parcours non linéaires :

• Reconversions professionnelles (nombreux exemples d'anciens consultants, juristes ou même médecins devenus product managers)
• Autodidactes ayant développé leurs compétences en dehors des cursus académiques traditionnels
• Profils internationaux apportant une vision multiculturelle essentielle pour ces entreprises souvent tournées vers l'international

Cette ouverture contraste avec l'approche plus conservatrice des acteurs traditionnels qui privilégient encore souvent les diplômes prestigieux et les parcours classiques.

"Dans notre RegTech, 30% de nos collaborateurs sont issus d'une reconversion professionnelle. Cette diversité est notre force pour comprendre les problématiques réglementaires sous des angles différents." — Sarah M., DRH d'une RegTech française

Les défis pour les recruteurs traditionnels

Le grand écart culturel

Les banques, assurances et cabinets de conseil traditionnels se retrouvent face à un dilemme : comment attirer les talents de la tech tout en préservant leur culture d'entreprise historique ?

Ce décalage se manifeste à plusieurs niveaux :

• Hiérarchie vs horizontalité : les structures plates des startups contre les organisations pyramidales
• Process vs agilité : la rigueur procédurale face à l'expérimentation continue
• Stabilité vs disruption : la sécurité de l'emploi contre l'excitation du changement

Certains grands groupes tentent de résoudre cette équation en créant des entités autonomes, véritables "startups internes" avec des codes et des méthodes de travail propres. D'autres optent pour des acquisitions stratégiques, intégrant des équipes entières de FinTech pour insuffler un esprit d'innovation.

La course aux compétences rares

La compétition pour attirer les profils hybrides est particulièrement intense. Face à cette situation, les acteurs traditionnels développent de nouvelles stratégies :

1. Partenariats avec des écoles et bootcamps pour former les talents aux compétences spécifiques
2. Programmes de reconversion interne permettant aux collaborateurs d'acquérir de nouvelles compétences techniques
3. Création de labs d'innovation offrant un environnement de travail proche des startups
4. Politiques de rémunération repensées incluant des éléments variables et des stock-options pour rivaliser avec les packages des FinTech

"Nous avons créé une Digital Academy interne qui a déjà formé plus de 200 collaborateurs aux métiers de la FinTech. C'est notre réponse à la pénurie de talents." — Philippe D., Directeur des Ressources Humaines d'une banque française

La marque employeur : un enjeu stratégique

Le storytelling comme arme de recrutement massif

Les entreprises innovantes du secteur financier ont compris que leur attractivité repose aussi sur leur capacité à raconter une histoire inspirante. Elles misent sur des valeurs fortes :

• L'impact : "Nous transformons la finance pour la rendre plus accessible"
• L'innovation : "Rejoignez-nous pour inventer les solutions de demain"
• L'inclusion : "Chez nous, la diversité des parcours fait notre force"

Cette narration, relayée sur les réseaux sociaux, lors d'événements tech et dans leurs communications de recrutement, permet de capter l'attention des talents qui cherchent du sens dans leur carrière.

La transparence comme principe fondateur

Une autre rupture majeure concerne la transparence dans le processus de recrutement. De nombreuses FinTech et AssurTech affichent désormais clairement :

• Les fourchettes de salaires dès l'annonce
• Les étapes précises du processus de recrutement
• Les défis réels que le candidat devra relever
• L'environnement technologique et les méthodes de travail

Cette approche attire naturellement des candidats en phase avec leur culture et leurs valeurs, réduisant les déceptions mutuelles et améliorant la rétention.

Des méthodes qui irrigent tout l'écosystème

L'influence sur les banques et assurances traditionnelles

Face à la concurrence des startups pour attirer les talents, les acteurs historiques du secteur financier sont contraints d'évoluer :

1. Simplification des processus de recrutement
2. Modernisation des environnements de travail (flex office, remote work)
3. Assouplissement des codes vestimentaires et comportementaux
4. Valorisation de l'innovation et de l'intrapreneuriat

Cette transformation n'est pas qu'esthétique. Elle touche au cœur même de ces organisations et à leur capacité à se réinventer face aux défis du numérique.

Le rôle des cabinets de recrutement spécialisés

Dans ce nouveau paysage, les cabinets de recrutement jouent un rôle de pont entre deux mondes :

• Traduction des besoins des entreprises innovantes pour les candidats issus du monde traditionnel
• Accompagnement des talents dans leur transition vers des environnements plus agiles
• Conseil aux organisations sur l'évolution de leurs pratiques RH

Les cabinets les plus performants sont ceux qui comprennent à la fois les codes de la finance traditionnelle et ceux de l'écosystème tech.

"Notre valeur ajoutée réside dans notre capacité à identifier les talents capables de s'épanouir dans ces environnements hybrides, entre finance et technologie." — Martin L., fondateur d'un cabinet de recrutement spécialisé

Les défis à venir pour le recrutement dans ces secteurs

L'équilibre entre tech et humain

Si les compétences techniques sont essentielles, les entreprises prennent conscience que le "tout technologique" a ses limites. L'enjeu des prochaines années sera de recruter des talents capables de :

• Humaniser la technologie financière
• Créer des interfaces intuitives accessibles au plus grand nombre
• Concevoir des algorithmes éthiques et responsables
• Maintenir la relation humaine dans un univers de plus en plus automatisé

Les profils alliant expertise technique et intelligence émotionnelle seront particulièrement valorisés.

L'internationalisation des talents

Autre défi majeur : l'internationalisation croissante du marché des talents. Les FinTech, AssurTech et RegTech françaises sont en compétition mondiale pour attirer les meilleurs profils. Cela implique :

• Des processus de recrutement adaptés aux candidats internationaux
• Une gestion de la diversité culturelle au sein des équipes
• Des packages de rémunération compétitifs à l'échelle internationale
• Des politiques de mobilité attractives

Les entreprises capables de créer un environnement véritablement international auront un avantage significatif.

Comment préparer l'avenir du recrutement dans ces secteurs innovants

Former plutôt que recruter : une tendance de fond

Face à la pénurie de talents, de plus en plus d'entreprises innovantes dans le secteur financier optent pour une stratégie alternative : former en interne des profils prometteurs plutôt que de se battre pour les rares experts disponibles.

Cette approche se traduit par :

• Création d'académies internes dédiées aux compétences tech-finance
• Partenariats avec des universités pour co-construire des formations
• Programmes d'alternance et de graduate spécifiquement adaptés aux besoins
• Mentoring inversé où les jeunes talents partagent leurs compétences digitales

Cette stratégie permet non seulement de répondre aux besoins en compétences, mais aussi de fidéliser les collaborateurs grâce à des parcours de carrière enrichissants.

L'intelligence artificielle au service du recrutement

Les technologies qui transforment la finance commencent également à révolutionner les méthodes de recrutement elles-mêmes :

1. Algorithmes de matching pour identifier les candidats correspondant précisément aux besoins
2. Chatbots pour les premiers niveaux d'échange avec les candidats
3. Analyses prédictives pour anticiper les besoins en compétences
4. Outils d'évaluation basés sur des mises en situation virtuelles

Ces innovations permettent d'accélérer les processus tout en réduisant les biais de recrutement. Toutefois, l'accompagnement humain reste indispensable pour les phases décisives de la sélection.

Conclusion : vers un nouveau paradigme du talent financier

La révolution du recrutement dans les secteurs FinTech, AssurTech et RegTech n'est qu'à ses débuts. Au-delà des transformations déjà observables, c'est toute la conception du talent et de la carrière dans la finance qui est en train d'évoluer.

Les professionnels les plus recherchés seront ceux capables d'évoluer constamment, d'apprendre en continu et de naviguer avec aisance entre expertise métier et maîtrise technologique. La formation initiale perdra en importance face à la capacité d'adaptation et d'apprentissage tout au long de la vie.

Pour les entreprises, l'enjeu n'est plus seulement d'attirer les meilleurs talents, mais de créer un environnement où ils pourront exprimer pleinement leur potentiel et évoluer au rythme des innovations technologiques.

Cette transformation profonde du recrutement dans la finance tech n'est pas qu'une adaptation à la marge. Elle préfigure ce que sera le monde du travail de demain : plus fluide, plus hybride, plus centré sur les compétences que sur les diplômes, et résolument tourné vers l'innovation permanente.